Ils n’ont que le mot électricité à la bouche. Une fée qui, d’un coup de baguette magique, changerait la face du monde en tournant, dès 2035, définitivement le dos aux véhicules neufs avalant des énergies fossiles trop polluantes et de plus en plus chères.
« ils » ce sont les constructeurs automobiles plus ou moins contraints par l’Europe et englués dans cette marche forcée à rejeter toujours moins de CO2. Notamment celui de leur SUV lourds et gourmands, dont ils font leur choux gras depuis des années !
« Ils » ce sont les automobilistes, de plus en plus nombreux (1) animés par la volonté de sauver la planète, qui rêvent d’une voiture propre, mais sont loin d’imaginer qu’un véhicule électrique est beaucoup plus lourd qu’un thermique et peut aussi tomber en panne (2). Que partir en vacances dans le Sud par l’autoroute risque d’entamer leur enthousiasme lorsqu’il devront dégoter une borne (3) de recharge libre et à leur convenance. Puis d’attendre encore un bon moment avant de repartir pour s’arrêter de nouveau 200 bornes plus loin (eh oui, à 130 à l’heure, avec la petite famille et chargés comme des baudets, c’est à peu près l’autonomie qu’ils peuvent espérer !).
« Ils », ce sont enfin les décideurs européens qui continuent pourtant à se déplacer en avion ou, pour ce qui nous intéresse, dans des berlines à moteurs en partie thermiques, suivies d’escortes motorisées dont on aimerait connaître le bilan carbone.
Les deux pieds dans le même sabot
Mais convenons-en. Il est temps de passer à autre chose, d’utiliser d’autres moyens pour faire tourner nos « chères bagnoles ». Car le modèle de déplacements actuels a vécu et les ressources fossiles finiront bien par s’épuiser un jour.
Mais cette marche forcée vers le tout électrique revient à mettre les deux pieds dans le même sabot et se casser la g…. Sans parler des dégâts collatéraux sur l’environnement (tiens ?…) causés par l’extraction des terres rares nécessaires à la fabrication des batteries. Au Portugal, notamment, un projet minier à Barroso inquiète les riverains qui se font entendre des médias. Contrairement à certaines contrées bien plus éloignées … et oubliées.
A « Soupapes » nous avons déjà abordé ce problème. Même si, ça et là, des initiatives voient le jour pour le recyclage des batteries et la réutilisation de certains matériaux, des extractions seront néanmoins toujours nécessaires pour assurer la demande.
Pourtant d’autres solutions existent
Sauf à encourager les citadins à laisser leur voiture au garage, ce qui ne serait pas forcément stupide et à condition que les collectivités mettent le paquet sur les transports en commun, les têtes pensantes européennes feraient bien de se débarrasser de leurs œillères et s’intéresser de plus près aux autres alternatives qui peuvent, elles aussi, contribuer à nous faire respirer un air plus pur. Aux dernières nouvelles il semblerait que ce soit le cas ?
Certes, comme le 100% électrique, aucune n’est totalement vertueuse (4). Elles ont en tous cas le mérite d’ouvrir d’autres voies. Que dire, entre autres, des carburants synthétiques utilisés en compétition par Porsche et qui pourraient être diffusés à plus grande échelle et devenir plus abordables ? Ou celui fabriqué par Total (5)? De l’éthanol extrait des cuves de lisier ? Ou de l’hydrogène vert ? Sans oublier, rendons-leur cet hommage, le travail constant des constructeurs qui a permis de diminuer la puissance des moteurs tout en maintenant un niveau de performance égal voire supérieur à ce qu’ils proposaient il y a quelques années.(6)
Au lieu de cela, l’Europe a tout misé sur une seule option. Alors que l’automobile classique évolue depuis plus d’un siècle pour être toujours plus propre, la décision européenne d’imposer le tout électrique ne date que de quelques mois.
A vouloir aller trop vite …
Alain Vouhé
-1 Selon une étude menée par Yougov pour Opteven, les Français se tournent de plus en plus vers l’électrique (56 198 véhicules électriques neufs en 2022 à fin avril), mais l’étude démontre qu’un 1/3 d’entre eux choisit l’occasion. (NDLR : sans doute pour le moindre coût)
-2 Toujours selon Opteven, Contrairement aux idées reçues, le véhicule électrique a besoin d’entretien et de réparation, tout comme le thermique. En effet, si près de 30 % des intentionnistes (ceux qui achèteraient un VE) estiment le véhicule électrique plus fiable que le véhicule thermique, dans les faits les chiffres montrent que l’électrique est une voiture comme les autres : 41 % des propriétaires ont été confrontés à un incident, 46 % avec un véhicule d’occasion. L’étude révèle même une surreprésentation en assistance des véhicules électriques. En effet, 1 propriétaire de véhicule électrique sur 5 (18 %) déclare avoir déclenché une intervention dépannage-remorquage, chiffre nettement plus élevé que pour les voitures thermiques (entre 5 % et 10 % par an selon les usages). NDLR : Du fait de son poids largement supérieur (exemple : près de 400 kg d’écart entre une 208 thermique et son équivalent électrique), il userait les pneus plus vite que les thermiques, mais consommerait moins de plaquettes de frein grâce au couple moteur plus important.
-3 Des exigences de couvertures par des bornes de recharge sont aussi posées, avec l’ambition d’une station publique tous les 60 kilomètres sur le réseau transeuropéen de transport d’ici à 2025 (avec au moins une borne ultrarapide, de puissance supérieure à 150 kW). Dans un rapport publié le 13 avril dernier c’est la Cour des comptes européenne qui alerte. Selon elle, « l‘UE est encore loin de l’objectif qu’elle s’est fixé dans le cadre du Pacte vert (…) et elle ne s’est pas dotée d’une feuille de route stratégique globale pour l’électromobilité ». Et de rajouter : « Si le déploiement des infrastructures continue au rythme de la période 2014-2020, il y a fort à parier que l’objectif du million de points de recharge ouverts au public à l’horizon 2025 ne sera pas atteint ». D’après la Cour il faudrait inaugurer « environ 150 000 nouveaux points (…) chaque année, soit approximativement 3 000 par semaine ». Chaud devant !
-4 Quid de la production d’électricité pour satisfaire les recharges ? Les événements actuels voient redémarrer ou renforcer la production à partir de centrales à charbon (bonjour l’écologie !!. ) Et les centrales nucléaires (en France notamment) sont tributaires de périodes de maintenance ! Et, face à la demande, les tarifs risquent fort d’augmenter.
-5 Quoi de mieux pour se refaire une virginité ? Le pétrolier Total a créé HVO100. Un carburant d’origine 100% renouvelable, fabriqué à partir d’huiles végétales durables, ou à partir de retraitement des déchets (graisses, animales, huiles de cuisson, huiles résiduelles etc.). C’est un gazole paraffinique de synthèse, certifié durable, conformément à la directive énergies renouvelables de l’Union Européenne.
-6 De son côté, Mobilians prétend que cette décision « sera lourde de conséquences, et aura un coût important pour la collectivité. Des dispositions qui renforceront les inégalités sociales en matière de mobilité, et mettront à mal la souveraineté économique de l’Union européenne ».
Selon l’organisme, « le choix unique opéré sur la motorisation électrique, c’est aussi le choix d’une mobilité réservée aux plus aisés. Les véhicules électriques sont significativement plus onéreux que leurs équivalents thermiques, et ce, malgré une politique de subventions, et la parité des prix entre véhicules électriques et véhicules thermiques ne sera pas atteinte avant plusieurs années. Le coût d’une telle réglementation pour la collectivité sera extrêmement élevé. (…) Il est primordial que l’Union européenne mette en œuvre un plan d’accompagnement et de transformation de la filière, qui permette d’éviter de tirer un trait sur l’un des derniers secteurs d’excellence en Europe, ce qui aggraverait par là-même notre déficit commercial »….